Alceste à Bicyclette / DVD Pathé!

Mercredi, 12 Juin, 2013 - 17:45

De la vertu d’être misanthrope…

Alors que les magistrats s’acharnent sur Stéphane Richard dans l’affaire Tapie, alors qu’ils viennent de blanchir DSK et Martine Aubry, la lucidité d’Alceste redevient exemplaire. Ainsi, il serait bon d’être rigoureux, de refuser les compromissions, d’oser dire ce qu’on pense vraiment. Les époques tièdes rejetèrent les disciples d’Alceste dans la marge. Fabrice Lucchini l’incarne parfaitement. Pour cela, il a composé son personnage avec les costumes de deux écrivains qu’il admire, Louis Ferdinand Céline, et Paul Léautaud. A certains moments, on voit Céline revenu de Singmaringen, installé à Meudon avec Lucette. Merveilleux. A d’autres, on entre dans la maison avec jardin, où l'ermite de Fontenay-aux-Roses vivait avec ses chiens et ses chats. En solitaire irascible, Fabrice Lucchini est d’une époustouflante vérité. Lambert Wilson traduit parfaitement les bobos de notre quotidien. Il est un Philinte parfait qui voudrait jouer Alceste, mais qui ne le pourra jamais. Serait-il plus glorieux d’être Alceste que Philinte ? Le premier se révolte. Il donne des coups, mais, il en reçoit beaucoup. Le second est prêt à toutes les acceptations. Il est, ce qu’il y a de pire dans l’esprit français. Les veaux, tels que les définissait, le Général de Gaulle. Ceux-là même qui trouvèrent de la grandeur chez le retors François Mitterrand. Ceux, enfin qui ont élu François Hollande Tartandouille. Le cinéma de Philippe Le Guay n’a rien de franchouillard. Il n’a pas l’air d’avoir acheté sa caméra dans une pochette surprise. Rien d’étriqué. Ses cadres sont larges et soignés. Nous n’avons pas la sensation que le film fut tourné dans un anus. Il y a de la lumière. Nous sommes habitués à un cinéma français sordide, où chacun obtient la possibilité de se saisir d’une caméra par un honteux système de subventions, pour nous entraîner dans d’infinis délires au cœur d’orangés pisseux, de murs et de meubles blafards. Ici, les plans ne sont pas éclairés à la bougie. Le film de Philippe Le Guay est scénarisé. Nous sommes tenus par une histoire, un contexte, des références. Inhabituel et réjouissant. Fabrice Lucchini n’en fait pas trop. Il est juste au service de son rôle. Lambert Wilson prouve qu’il peut interpréter de vrais rôles au cinéma. Alceste à bicyclette symbolise une noble occasion de se poser de vraies questions sur l’être humain, sur nous, avec Molière hier et aujourd’hui. Comment fait-on du théâtre en 2013 ? Comment dire un texte classique, et toujours percutant ? Jusqu’à quel point un comédien peut-il « en faire » sans s’abstraire du sens installé par l’auteur ? Le Misanthrope retrouve là une formidable actualité… Recommandé à tous les imbéciles heureux, et Dieu sait, s’ils sont nombreux !...