Au Mac de Lyon, Adel Abdessemed, l'ultime exposition de Thierry Raspail...

Dimanche, 18 Mars, 2018 - 12:20

Un événement légitimé par près de vingt ans de présence, sur le devant de la scène des arts plastiques...

Adel Abdessemed et Thierry Raspail

L'œuvre magistrale exposée par Adel Abdessemed fait dans le sensationnel. Elle frappera les consciences. Son passé est lourd d'une expérience tragique. Il est parti d'Algérie après l'assassinat par les islamistes du directeur des beaux-arts d'Alger, Ahmed Asselah, en 1994. Depuis, présent dans la collection de bijoux d'artistes de Diane Venet à Paris, au Musée des Arts décoratifs, il déclara : «  Je ne suis pas musulman, je suis spirituel et j'ai le sens du sacré. Je suis un artiste, et mon ascèse, c'est la créativité. » Son installation intitulée « Shams » (soleil en arabe) marquera les consciences. Elle fut présentée en 2013, au MATHAF de Doha en Arabie saoudite. Il s'agit pour Adel Abdessemed, né en 1971, à Constantine, en Algérie qui vit et travaille à Paris, de vous confronter avec les damnés de la planète, de vous installer en face des pires images de notre monde contemporain, inscrite dans l'argile. Emmurés les corps, les objets,la vie, les souvenirs. Une prouesse technique qui n'a coûté que 60 000€. Une performance ! Malaxer toute cette terre qui va sécher avec le temps, et se craqueler, pour dire les corps en souffrance des exploités du monde entier, fut un travail prodigieux, herculéen. La misère, Adel Abdessemed l'a connue, il se souvient : « En Algérie, à partir du 15 du mois, quand la paie de mon père se faisait attendre, ma mère nous préparait une tranche de pain avec une tomate et un peu d'huile d'olive. En début de mois, elle nous faisait un festin, des pâtisseries à n'en plus finir. Les deux me convenaient. Je travaille aujourd'hui, comme ça, à la croisée des extrémités. » Elève diplômé de l'école des beaux-arts de Lyon, il conserve le souvenir de ses visites au musée des beaux-arts. Elles nourrissent parfois son inspiration. Le jour du vernissage, je parcourais les salles avec Thierry Raspail, lorsque devant l'œuvre vidéo « Printemps » où, on voyait des poulets en feu, pendus par les pieds, à partir d'un effet spécial technique. Stupéfait par la violence de cette image, je dis à Thierry Raspail qu'il aurait des problèmes avec la Société Protectrice des Animaux. Elle ne fut pas la plus virulente. Les réseaux sociaux obtinrent la censure. Il fallut interrompre sa diffusion. Thierry Raspail n'a pas failli à son devoir, comme toujours en pareil cas, il a courageusement défendu les options de l'artiste. Pendant votre visite, n'oubliez pas de porter votre regard sur les collections présentées, elles témoignent de l'acuité du regard de Thierry Raspail, et de son équipe. Thierry Raspail a toujours su trouver les financements nécessaires. Son successeur sera t'il à la hauteur ? En tous cas, la ville de Lyon a le devoir de célébrer Thierry Raspail et tous ceux qui participèrent à la constitution de cette Collection inégalable, Thierry Prat en tête, mais aussi, Isabelle Bertolotti et Percebois. Mac de Lyon, jusqu'au 8 juillet 2018. Ouverture du mercredi au dimanche de 11h à 18h. Cité internationale-81, quai Charles de Gaulle-Lyon 6e. Alain Vollerin