Indocile / Actes Sud

Mardi, 7 Février, 2023 - 12:17

La révolution inattendue d’une femme ménopausée…

Dana Spiotta trace avec perspicacité le portrait d’une femme qui prend soudain conscience de sa condition, pourtant confortable. A cinquante-trois ans ses réveils nocturnes portent Sam à réfléchir au sens de sa vie, à la maternité, à la transformation du corps, à la mortalité et à l’état de son pays. Un jour elle découvre une vieille bâtisse dans un quartier misérable de Syracuse (aux Etats-Unis, pas en Sicile). C’est le coup de foudre. Elle décide de l’acquérir et de s’y installer. Une maison sale et croulante Arts and Crafts, sa magnifique maison délabrée, jumelle de son magnifique corps délabré. Du jour au lendemain, elle part animée d'une "rage sourde à la raison". Son mari Matt, sa fille Ally et sa mère Lilly réagissent chacun à leur façon. Ils pensent que c’est un coup de tête, qu’il suffit d’attendre, que ça va passer. Elle agace sa fille de dix-sept ans par son ingérence. Son petit ami Joe Moreno, promoteur et client de son père, dont un vernis d’altruisme masque les profits est tout ce que Sam déteste. A la salle de sport elle remarque que les gens semblent plus obsédés que jamais par l’idée du moi. Le culte de l’apparence, la myopie sur l’effondrement créent un repli sur la sphère intime au moment où le monde et son pays en particulier se trouvent dans un délitement déplorable. Dans un rapport sensuel, Sam entreprend de restaurer respectueusement cette maison au charme cosi. Elle réagit à un flyer : Embrassez l’ERT (acronyme d’extinction à court terme) une association de femmes, s’épanouit dans a solitude et s’interroge : comment être une fille, une épouse, une mère dans un pays qui implose ? Comment accepter les métamorphoses du corps ? Suffit-il de résister à la conformité et se projeter dans l’utopie ? Que va-t-elle devenir ? Risque-t-elle de tout perdre ? Ou à l’inverse, de tout gagner ? Indocile est un titre aussi subtilement choisi par Dana Spiotta que le sujet et son traitement littéraire. Notons la superbe photo de la couverture. Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Yoann Gentric. Broché. Format : 11,5 x 21,7 cm. 384 p. 23€. Paule Martigny