Le Réseau Pourpre / Actes noirs – Actes Sud

Vendredi, 7 Mai, 2021 - 10:01

En espérant que ce ne soit qu’une fiction…

Carmen Mola a publié son premier roman, « La Fiancée gitane », en 2019 (parution simultanée en version poche, Babel noir). Son nom est le pseudonyme d’une madrilène de quarante-cinq ans, mariée et mère de trois enfants. Face au constat des émissions de téléréalité parfois extrêmes, des dérives d’internet, avec des décapitations en direct, les réseaux pédophiles, et la violence des jeux vidéos sanguinaires, Carmen Mola n’a pas eu de peine à imaginer (mais peut-être n’est-ce pas de la fiction, hélas) le Réseau Pourpre. Par une journée d'été caniculaire, l'inspectrice Blanco fait irruption avec son équipe dans la villa d'une famille madrilène de la classe moyenne. Elle se rue dans la chambre du fils. La scène diffusée en direct sur l'ordinateur de l'adolescent dépasse l'entendement. Voilà des mois qu’elle piste le sinistre Réseau Pourpre et qu’elle mène une implacable incursion dans l'univers du dark web et de ses «snuff movies». Ce sont des films trash dans lesquels les victimes ne sont pas des acteurs. Elena Blanco, la plus célèbre flic d’Espagne s’implique dans cette enquête avec l’énergie du désespoir. Son fils Lucas a été enlevé huit ans plus tôt, il avait dix ans. Et il lui semble l’avoir reconnu sous les traits du tortionnaire de la jeune fille martyrisée en direct. Les « voyeurs » sont prêts à dépenser des sommes rondelettes pour ces films clandestins macabres. Ce business juteux en cache un autre tout aussi sinistre. Des enfants sont enlevés et séquestrés pour des combats assortis de paris. Majoritairement des orphelins, des migrants ou des fugueurs. Les combats sont organisés dans une cage octogonale où deux jeunes s’affrontent à mains nues jusqu’à la mort. Lucas est l’un d’eux. Il est devenu un « gladiateur » redoutable qui gagne tous ses combats. L’organisation est parfaitement compartimentée, avec au sommet, le Père, dont personne ne connaît l’identité à part  Dimas, son lieutenant responsable des basses œuvres. A l’époque, Lucas avait été enlevé pour que sa mère cesse d’enquêter sur les paris d’un certain Kortabarria, mais à présent son fils est l’un d’entre eux, un monstre sans états d’âme. Que fera-t-elle si un jour elle se retrouve face à lui ? Un roman très dérangeant qui soulève des questions auxquelles nous ne pouvons pas échapper. Le fait que l’auteur soit elle-même une mère donne une densité particulière au sujet. Traduit de l’espagnol par Anne Proenza. Broché. Format : 14 x 24 cm. 384 p. 23€. Paule Martigny – Mémoire des Arts