Perversion / Editions Écriture

Chantal Milman diplômée de littérature anglo-saxonne vit entre Paris et la côte amalfitaine en Italie. Son premier roman "Preuve d'amitié" (Écriture, 2020), avait déjà pour sujet la réappropriation de la féminité. Une jeune femme avait été gravement brûlée au ventre. Les cicatrices entravaient son chemin vers les hommes. Avec "Perversion" les cicatrices sont psychologiques mais tout aussi paralysantes. Charlotte a rompu avec George, son compagnon pianiste, le faux gentil manipulateur, parfait gentleman en société qui en privé sait si bien taper où ça fait mal, animé du désir irrépressible de la détruire. Elle voulait le quitter mais il l'a devancée en poussant la perversion jusqu'à l'abandonner pour une autre. Charlotte, femme sous influence a perdu sa voix. Avant George elle était chanteuse de jazz. Sous son emprise, sujette à ses humiliations elle avait renoncé à sa carrière. La rupture : elle n'imaginait pas que la douleur pouvait avoir un impact sur les cordes vocales. Paradoxalement malgré sa souffrance brute, l'absence de George lui est insupportable. Fille unique, elle avait vingt-deux ans à la mort de ses parents dans un accident de voiture. Elle est désormais seule. Désemparée elle entame une analyse. Elle est anéantie et sa solitude est étrange à vivre. George a détruit quelque chose en elle. Elle est en manque, mais de quoi ? Elle décide alors de séjourner dans le village de l'été de son enfance à Ravello en Italie. A la mi-temps du livre Charlotte vit une relation charnelle inattendue, réveillée de son "sommeil". C'est un instant magique, le désir révélé après une longue abstinence. Juste la volupté, la sexualité dans sa plénitude. Le plaisir est bienfaiteur mais la peine revient quand même. Puis l'épisode Covid bouleverse tout. Charlotte continue ses séances avec le psychiatre par WhatsApp. Sans cette analyse elle se demande ce qu'elle serait devenue, en dépit de l'affection de ses amis. Quand le deuil de sa rupture prendra-t-il fin ? Retrouvera-t-elle sa voix ? L'amour peut-être y pourvoira ? La rupture, une fois son deuil consommé grâce au chemin psychanalytique s'avérera une chance. Chantal Milman dans ce roman où les épisodes de la vie de Charlotte alternent avec les séances avec son analyste va relier son personnage à sa condition féminine comme elle l'avait fait avec Mylène dans son précédent roman. On comprend encore mieux la citation de Gérard Szwec (Au bout du rouleau, Puf, 2021) qu'elle à choisie en exergue, dont extrait : "La légende grecque peut se lire comme une métaphore de la prise de conscience d'un corps érotique. Ce que ne sait pas Psyché sur son corps se trouve dans l'inconscient." Un roman conseillé. Broché. Format : 14 x 22,5 cm. 256 p. 20€. Paule Martigny