Nous avons décidé de publier, une lettre à Vincent Bolloré signé par Lucas Rougerie, frère d'Alice Rougerie, journaliste en grève à i-Télé, même, si, nous ne partageons pas complètement son opinion.

Mercredi, 9 Novembre, 2016 - 08:18

Surtout, au moment, où l'élection de Donald Trump démontre l'inanité dangereuse de la presse française, soumise aux exigences des pouvoirs de Gauche qui n'hésite pas à truquer les sondages.

Bonjour Vincent,   J’ai 25 ans, deux Masters 2 et suis bientôt à la recherche d’un boulot. Suite aux bouleversements éditoriaux d’iTélé, ou Cnews, ou DirectNews, ou NewsMatin – je m’y perds un peu -, je serai peut-être accompagné par ma grande sœur au moment d’effectuer mes premières démarches au Pôle Emploi. Ça fait plus de trois ans qu’elle s’investit, avec passion, au sein de la rédaction que vous émiettez progressivement. Pour la première fois, je la vois hésitante face à un destin qu’elle ne maitrise plus. Tout avait pourtant bien débuté. Après des premiers mois sans heurt, la chaîne a changé de main à l’été 2015. C’est le début des décisions étonnantes, avant le spectacle des dernières semaines. Les guignols, symboles de démocratie et véritable institution, font désormais la part belle à Kanye West. La vacuité y remplace l’insolence. Egalement, au revoir Ali Badou et Le Supplément. Au diable Spécial Investigation et Le Zapping, pour leur impertinence mal placée. Bon, je pensais qu’I-télé était passé entre les gouttes. J’étais rassuré pour ma sœur, elle qui a étudié pendant huit ans et fait tant de sacrifices pour atteindre ses objectifs professionnels. Et puis Bruce Toussaint, sentant l’orage venir, s’est préservé et a accepté l’offre de France Télévision. Bien lui en a pris. Car, depuis le début de l’été, l’heure est aux grandes manœuvres. Le fait que Jean-Marc Morandini soit poursuivi en justice ne m’intéresse pas, tant qu’aucun tribunal n’aura rendu son jugement. L’ancien animateur de Tout est possible doit sa place sur iTélé pour services rendus à l’époque de Direct 8. Pourquoi pas, moi non plus je n’oublie pas mes copains après un coup de main. Par contre, j’ai peur que ça ne lui rende pas tant service que ça, à Jean-Marc. Voir sur iTélé celui qui exerce une activité médiatique – et certainement pas journalistique - aussi trouble est déconcertant. Il présente une émission absurde, où une consultante en ressources humaines devient une spécialiste de la vie politique américaine. Avait-t-il vraiment besoin d’être aussi ridicule que ça, surtout en ces temps de déboires judiciaires ? Il était très bien sur Direct 8 et comme un poisson dans l’eau sur NRJ12. Mais, sur la chaine numéro 16 de la TNT, certainement pas. Avec iTélé, le groupe Bolloré avait une occasion en or d’adoucir son image capitaliste et sans scrupule, en développant un média d’information reconnu et déjà en place. Aujourd’hui, il est prévu qu’iTélé intègre un « pôle média » à l’image de notre société, où le creux prend progressivement le pas sur le fond. Ça fonctionnera certainement, à en croire les audiences de Cyril Hanouna. Ce même animateur qui n’hésite pas à mettre Lâam dans un costume de chouette en acces prime time, quand il ne minimise pas une agression sexuelle face à des millions de jeunes pour qui il est un modèle. Ma sœur Alice est un modèle de rigueur professionnelle et personnelle. Elle adore son métier, dans lequel elle s’investit sans compter. C’est un détail, mais, en 25 ans, je ne l’ai jamais vu perdre quoique ce soit, ni oublier une date importante ou futile. Elle m’a encore envoyé un sms pour la saint Luc (celle qui se rapproche le plus de mon prénom), le 18 octobre dernier, en plein conflit social chez iTélé, Cnews ou News Factory : je suis toujours égaré. Elle ne le montre pas, mais, je la sais préoccupée par cette situation. Hier, elle a perdu sa carte de transport. Elle, l’intransigeante, l’appliquée, la méticuleuse, est devenue étourdie. Ce changement de cap brutal et sans aucune humanité met en danger des carrières encore en gestation ou confirmées, autant qu’il affecte l’humain. Ça ne concerne pas uniquement ma sœur mais aussi l’intégralité de ses collaborateurs, que je devine désemparés de voir la digue de leur attachement au journalisme emporté par la vague des intérêts pécuniaires. Lucas Rougerie