Qui a tué l'homme-homard? / Buchet-Chastel

Mardi, 16 Avril, 2019 - 09:38

Rocambolesque et cynique

Un petit village de Lozère dans les hauteurs du Gévaudan abrite depuis soixante-dix ans les membres d'un petit cirque itinérant. Le patron de la troupe a été assassiné, et depuis, démunis après sa disparition, les circassiens ont vécu sur place. Il faut dire que tous, sont des freaks : la femme à barbe, l'homme élastique, l'homme-tronc, les sœurs siamoises, l'homme-éléphant, le géant, et l'homme-homard, misanthrope détesté de tous, qui vient d'être retrouvé mort, découpé en morceaux. L'enquête sera menée par l'adjudant Pascalini et son stagiaire Babiloune. Le caractère insolite du roman de J.M. Erre est décuplé, car la narratrice est une jeune tétraplégique de vingt-trois ans. Son père, maire de Margoujols, a obtenu le haut débit pour le village afin qu'elle puisse utiliser son ordinateur, car la seule chose qu'elle peut remuer est son index, dont elle se sert convulsivement. Vive le numérique! Lucie télécharge de préférence des romans noirs, des récits de crimes sadiques, ce qui lui permet d'imaginer qu'il y a des situations pires que la sienne. A bord de son fauteuil-roulant high-tech, recroquevillée, bavant, la tête penchée sur l'épaule, elle va épauler les gendarmes dans leur enquête. Autre élément, Lucie est dotée d'un esprit particulièrement caustique. Légume à l'extérieur, en surcharge de neurones à l'intérieur, elle est restée coincée au stade 2 : la colère. Si elle ne parle pas, en dehors de ffffffffchiééééééééé, elle est dotée d'une excellente ouïe, et emmagasine tout, en furetant à bord de son bolide. L'homme-homard avait annoncé qu'il allait révéler un terrible secret. Pas eu le temps. Couic. D'autres crimes suivont. Surprises au menu pendant sept jours d'enquête. Ce roman dans lequel J.M.Erre introduit des extraits d'un curieux blog d'une certaine Winona Jane, « Je vois la vie en monstre », démarre sur les chapeaux de roues. Tiendra-t-il la distance? La réponse est oui. Et, avec des réflexions et des dialogues que n'aurait pas reniés Michel Audiard. Un roman acide et drôle. Une prose alerte, corrosive, un pur régal. « Le Mystère Sherlock » (2012), est en cours d'adaptation au cinéma. Broché sous jaquette. 20,5 x 14 cm. 368 p. 19€. Paule Martigny