La guerre du silence / Les éditions du Cerf

Jeudi, 4 Mai, 2023 - 10:58

Pie XII, le nazisme, les Juifs. Comment expliquer ses "silences"?

Qui fut vraiment Pie XII, élu pape en 1939 ? Le "vicaire" du Vatican que décrivent des écrivains et des cinéastes l’accusant d’un mutisme d’autant plus coupable que peureux ? D’autres au contraire évoquent "l'évêque" de Rome protecteur de toutes les victimes du fascisme sous l’occupation de la Ville éternelle lui reconnaissant un courage d’autant plus efficace que taiseux? Pie XII lui-même disait : "Nous avons caché des centaines de Juifs à Rome, délivré des milliers de laisser-passer". Qu’en est-il vraiment ? L’auteur, Andrea Riccardi, cherche à reconstituer un pan de l’Histoire et replace Pie XII dans le contexte complexe de la Seconde Guerre mondiale. Cette période peut être aujourd’hui décrite dans sa complexité grâce à l’ouverture des archives du Vatican et à la masse d’études disponibles depuis mars 2020. Pour Pie XII "les années de guerre s’apparentent à un drame spirituel, au cours duquel il put constater la fragilité extrême de l’institution papale et la complexité du catholicisme. La reconstitution historique doit tenir compte de ces fragilités." Le travail d’un historien n’est pas celui d’un juge, il ne s’agit ni de condamner, ni d’absoudre. Grâce à ces pièces inédites, Andrea Riccardi reconstitue jour après jour ces années terribles telles qu’elles furent vécues par Pie XII et les raisons de ses choix drame après drame. Il n’exonère en rien les zones d’ombre, dont l’inclination de la Curie à l’antijudaïsme. Mais il éclaire comment un homme seul, investi de la plus haute charge spirituelle, a voulu mener la guerre du silence contre le silence universel recouvrant le mal extrême. Ce livre au retentissement mondial, est déjà traduit dans une dizaine de langues. Cette histoire n’est pas seulement celle du pape et du Vatican elle met en contact avec un flot de souffrances de toutes nature, à commencer par celle de la Shoah. Les tueurs étaient en majorité baptisés avaient été élevés dans le christianisme, allaient à l’église, et pourtant ils tuaient. Le christianisme ne constituait pas un mur, les bourreaux étaient guidés par une idéologie insensée. En l’occurrence ce fut l’échec du christianisme. Dommage que l’ouverture tardive des archives ait porté préjudice à l’image de l’Église. Andrea Riccardi, historien, professeur d’université à Bari puis à Rome, est l’auteur d’une œuvre scientifique au rayonnement international sur les relations entre religion et politique dans le monde contemporain. Également fondateur de la communauté Sant’Egidio et ancien ministre du gouvernement. Traduit de l’italien par Nathalie Bouyssès. Broché. Format : 24 x 15,5 cm. 396 p. 25€. Paule Martigny. Mémoire des Arts